L ' architecture
Crédit photo : Matthieu Lecouvey – Initial Ingénierie
Naissance du projet
Que trouver de mieux pour décrire l’architecture de ce mémorial que les commentaires rédigés par l’architecte André Mery-Riboulet lui-même, et qui accompagnaient son projet. Certes nous nous apercevrons qu’entre le projet décrit et illustré par la maquette qui en avait été faite et la réalisation définitive, bien des désirs de l’architecte n’ont pas été satisfaits. Comme il est précisé dans la page concernant l’histoire de ce monument, entre les subventions qui s’épuisèrent et les dons qui se tarirent, des choix s’imposèrent afin de réaliser l’essentiel au détriment de certains aménagements.
Cela étant posé écoutons la description du projet faite par l’architecte André Méry-Riboulet :
« 1. Le Parti de composition
………
– Imprimé d’un noble mouvement ascensionnel, le monument s’élève dans le ciel. Il est obélisque dans sa partie supérieure, dont la fonction essentielle sera de signaler sa présence à l’attention des voyageurs de la lande aride et plate ; marquant ainsi la permanence du souvenir, il provoquera le recueillement.
– La Ferme trop vétuste pour être conservée dans sa forme présente, il m’a paru judicieux, dans un souci de durée, de l’évoquer par son tracé planimétrique. Les fondations étant inchangées, les murs s’élèveront sur une faible hauteur, figurant les ouvertures. Le sol revêtu du même carreau de Gironde soulignera le réel caractère d’habitat. La porte principale de la salle commune et la fenêtre du grenier au-dessus construites en pierre dure, d’une architecture rurale belle dans sa simplicité et portant des blessures glorieuses, subsisteront en élévation, témoins éloquents du combat qui les meurtrirent. »
Autant le premier élément de la composition a été réalisé au travers de l’obélisque visible aujourd’hui, autant le deuxième élément qui devait symboliser la ferme a été revu en forte baisse. En effet, nous ne voyons actuellement que le cadre d’une porte en élévation et deux courts murets de part et d’autre symbolisant ainsi la ferme qui existait avant le drame, voir la photographie ci-dessous. Plus de carreaux de gironde, exit le muret symbolisant le pourtour complet de la ferme et disparition de l’ouverture de la fenêtre du grenier que l’on peut apercevoir sur la photographie ci-dessus, des ruines !
Finalisation du projet non exécuté
Reprenons le commentaire de l’architecte :
– « Un déambulatoire supérieur surplombant le niveau général du terrain, et auquel on accède de l’extérieur par des rampes ou emmarchements, assurera aux foules venues en pèlerinage la visibilité et la lecture facile du monument. En créant une discipline naturelle, il permettra des manifestations ordonnées.
– De par sa dénivellation formant ceinture, il rendra encore plus précieux l’intérêt central et déterminera à l’ensemble le caractère de crypte ouverte. L’accès de celle-ci ne pourra s’effectuer que par un petit escalier taillé dans les gradins où pourraient être inscrits en gravure les noms des Morts de la Résistance Régionale.
– Un déambulatoire construit en Opus incertum (NDLR : pierres de formes irrégulières posées de façon aléatoire) desservira le pourtour inférieur reliant par un seul côté la dalle sacrée flanquée de part et d’autre par des alignements de pierres tombales. Sur cette dalle de pierre dure, une inscription en forme de CROIX de LORRAINE, relatera le glorieux fait d’armes des Héros de SAUCATS, symbole de la Résistance de toute notre Région de SUD-OUEST. »
Ce troisième élément inspirant « une crypte à ciel ouvert », qui devait donner un aspect monumental d’un point de vue des dimensions du site, a complétement disparu, laissant l’obélisque « solitaire » sur son esplanade au niveau naturel de l’aire d’implantation. L’espoir des pèlerinages nombreux et naturellement canalisés laisse place aujourd’hui aux quelques cérémonies mémorielles, aux visites encadrées de groupes d’élèves, ainsi qu’aux visites volontaires, le tout dans un décor sobre et dépouillé. On retiendra cependant le principe de la gravure du récit du combat ainsi que des noms des jeunes résistants, non plus sur une dalle en pierre dure et écrit en forme d’une Croix de Lorraine, mais plus simplement sur les pans de mur situés de part et d’autre de l’encadrement de la modeste porte reconstituée, déjà le fruit d’une ambition restreinte ! (Photo n° 3)
Laissons libre cours aux choix de l’architecte ainsi qu’à ses suggestions :
– « Enfin, dans le bas du monument, un reliquaire sera aménagé pour recevoir le LIVRE D’OR, et divers objets dont la pieuse conservation s’impose.
– Un feu aménagé dans la partie supérieure du monument, outre les services inestimables qu’il rendrait à la navigation aérienne, réaliserait la veille permanente du souvenir.
– Le paysage de la lande aux abords du monument ne doit pas être modifié ; aucune plantation nouvelle de pins ou autres espèces n’est à préconiser. Seules les chaussées délimiteront le divin régime de la nature de la création humaine. »
Aujourd’hui, point de reliquaire que rien ne viendrait protéger des atteintes malveillantes qui malheureusement ne manquent pas. Cependant pour ce qui est de la lumière symbolique du souvenir, le monument dispose depuis le 05 novembre 2021, du privilège de ranimer la flamme du Soldat Inconnu attribué au Mémorial grâce à l’Ordre de la Légion d’Honneur. De même, le paysage de rase campagne simplement griffé par la route est conservé. C’est ainsi que les deux suggestions de l’architecte ont été exaucées.
Choix du matériau de construction du mémorial
Après le parti de composition, voyons le mode de construction tel qu’il a été envisagé par l’architecte André Méry-Riboulet :
« 2. Le mode de construction
C’est de la conception du Mémorial dont les proportions se doivent d’être en rapport direct avec l’ampleur de Sacrifice des Morts d’une part, et les disponibilités financières, d’autre part, qu’il me restait à fixer les matériaux de construction.
Mon choix s’est arrêté au béton de ciment armé en raison de son coût peu élevé en regard des matériaux de qualité plus précieuse, mais qui auraient limité les proportions désirables du Monument.
Le béton sera traité brut de coulage… »
On s’aperçoit que l’architecte est conscient des incidences financières tout en souhaitant aboutir à une construction monumentale. Le béton se révéla être la solution. On a vu cependant que le projet ne put pas être réalisé dans sa totalité. A cette fin penchons-nous sur le troisième point qui est celui du coût estimatif ou, comme l’appelle l’architecte, « l’économie du projet ».
3. L’économie du projet
« L’établissement du devis estimatif ci-joint, fait apparaître une dépense à engager de :
6.108.068 Francs qui pourrait être fractionnée en plusieurs tranches successives :
Ière tranche : OBELISQUE 2.865.425 Francs
2ème tranche : ENTOURAGE 1.745.200 Francs
Et SCULPTURES 675.000 Francs
Laissant une somme de 422.950 Francs pour les travaux imprévus et une somme de 399.593 Francs pour les honoraires. »
Il s’avère que la 2ème tranche concernant l’entourage, c’est-à-dire le déambulatoire, ne put pas se faire.
Les sculptures monumentales, au nombre de quatre, ornant chaque face de l’obélisque, sont également en béton brut, et mesurent 7,80 mètres de hauteur. Elles sont l’œuvre d’Armande Marty
Tant sur l’architecte que sur la sculptrice, vous en apprendrez davantage sur la page consacrée aux maîtres d’œuvre.